La référence

L’arrêté du 14 novembre 2018 définissant les modalités de prise en charge des aides auditives a introduit une nouvelle condition un peu obscure et non explicite pour justifier d’une prescription d’appareillage auditif : “un écart du rapport signal de parole / niveau de bruit (RSB en dB) de plus de 3 dB par rapport à la norme”.

Il existait certes des “références” pour divers tests d’audiométrie vocale dans le bruit (AVB) dans différentes langues (mais pas le français), et ces références étaient citées dans… une norme ! La norme ISO 8253-3:2012. On peut acheter ce document ici, pour un prix pas très modique, et on s’aperçoit qu’il existe donc différents niveaux de référence pour obtenir 50% d’intelligibilité à un certain rapport signal de parole/niveau de bruit (RSB, en dB) = le SRT50.

Selon le matériel vocal utilisé (mots, chiffres, phrases), le type de bruit utilisé (stationnaire, interrompu, réaliste, etc.) et leurs angles d’émission, chaque test avait, ce que l’on nomme, son propre SRT50.

Cet arrêté avait alors suscité plus de questions qu’autre chose car :

  • il n’existait pas réellement de normes, mais des références,
  • et ces références étaient différentes les unes des autres !

Donc, comment considérer ces 3dB par rapport à la “norme” ? Et pourquoi “3dB” ?

Cela faisait un peu penser aux 3% de déficit autorisés par l’Europe : d’où sortaient-ils ?

Heureusement, Zorro(dB) est arrivé ! Un think tank francophone a fourni un travail extraordinaire (je pense chaque mot) pour la SFA, recensant tous les tests d’AVB en français, avec leurs références, leurs intervalles de confiance et leurs modes de passation. Vous pouvez le télécharger ou le trouver sur le site de la SFA.

Et l’on apprend que les fameux “3dB d’écart par rapport à la norme” correspondent en fait à la moyenne des incertitudes de tous ces tests : 3dB. Et que “la norme” est en réalité “la référence” propre à chaque test, à condition de l’utiliser dans les conditions prévues par les concepteurs.

Cette notion est plus importante qu’il n’y paraît au premier abord : un patient peut très bien avoir une perte moyenne d’audition inférieure à 30dB HL (donc inappareillable aux yeux de la loi) mais un SRT50 à plus de 3dB de la référence dans le bruit pour un test donné. Nous avons alors toutes les bases juridiques pour justifier l’essai d’aides auditives.

Encore plus récemment, et afin de justifier ce point légal, l’institut Hörtech a fourni une mise à jour logicielle de son test dans le bruit (le Framatrix, ou sa version simplifiée le Frasimat) permettant de calculer l’écart des performances du patient par rapport à la référence (adultes pour le Framatrix, ou adultes et enfants en fonction de l’âge pour le Frasimat) :

Dans le cas testé ici, le delta est de 4,4dB par rapport à la référence (-1,6dB pour 50% d’intelligibilité, contre -6dB pour la référence).

Cette mise à jour est la révision 4 de la version 2 du Framatrix et du Frasimat.

Voilà, maintenant, nous sachons !

3 commentaires sur “La référence

  1. Bonjour, après relecture du travail de la SFA, je reste dubitatif sur l’utilisation du matériel phonétique de type VCV (voyelle-consonne-voyelle) alors que, sauf erreur de ma part, le cerveau francophone est adapté à une intégration CVC ! Merci de vos avis éclairés.

    1. Bonjour
      A ma connaissance, je n’ai jamais lu l’exemple de matériel vocal de type cvc (cod, til, vur, …) mais toujours de type vcv (atu, ebo, aba, etc.).
      Mais il est vrai aussi en littérature anglo-saxonne.
      Je pense que Frank Lefebvre serait plus calé que moi sur le sujet, et ses listes sont d’ailleurs du type vcvcvc.

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