Kocmoc

Mars 1873

« Le cornet acoustique« , écrivit Adolphe Ganot dans son Traité élémentaire de physique expérimentale, « sert aux personnes qui ont l’oreille dure. C’est un tube conique, en métal, dont l’une des extrémités, terminée en pavillon, est destinée à recevoir le son, tandis que l’autre extrémité est introduite dans l’oreille. Le pavillon sert ici d’embouchure, c’est-à-dire qu’il reçoit les sons venant de la bouche de la personne qui parle. Ces sons se transmettent par une suite de réflexions dans l’intérieur du cornet, en sorte que des ondes qui eussent pris un grand développement se trouvent concentrées dans l’appareil auditif, et y produisent un effet beaucoup plus sensible que ne l’eussent fait des ondes divergentes. »

Avril 1873

Même par rapport à son aspect coutumier, Edouard Ignatyevitch semblait ce jour-là sombre et soucieux. Depuis le décès de son épouse, trois ans et demi plus tôt, il s’était rabougri, tel un sapin tellement tordu par le vent et courbé par la neige qu’il ne parvient même plus à retrouver sa forme d’antan au cours de brefs étés radieux. Le teint blafard, les yeux rougis, Edouard Ignatyevitch examinait à la lumière quasi-estivale, qui entrait à flots par la fenêtre sud du petit salon, un courrier officiel, à travers la fumée pestilentielle de sa sempiternelle cigarette.

Non sans hésitation, Konstantin se leva du bureau en orientant son cornet acoustique dans la direction de son père.

« Qu’est-ce que c’est Konstantin ? »

La voix de son père lui parut aussi limpide que s’il lui avait parlé au creux de l’oreille.

« Un… cornet acoustique, père.

– Un « cornet acoustique » répéta ce dernier, d’une voix blanche.

-Oui, père. »

Constantin Tsiolkovsky est né en 1857. Une scarlatine dans l’enfance le laissera sourd. Publié en 1903, son livre « L’exploration de l’espace cosmique par des engins à réaction » et les suivants, seront à la base de l’exploration spatiale russe et de l’aventure des pionniers du Cosmos (Kocmoc) dans les années 50.

Un beau roman de Tom Bullough, Mécaniques du ciel raconte sa vie et les débuts de la conquête spatiale qu’il n’aura pas pu voir.

Devinette: le « Konstantin Tsiolkovsky » apparaît dans une saga de bande dessinée très célèbre. Laquelle ? (Y’a pas que l’audio dans la vie !).

6 commentaires sur “Kocmoc

  1. Non, c’est plus subtil. Et le « Konstantin Tsiolkovsky » est en partance pour beaucoup, beaucoup plus loin que la lune…
    Un indice: « Kim Keller »

  2. Pour les amateurs: il s’agit de la très belle saga « Les Mondes d’Aldébaran » de Léo. Série « Bételgeuse », Tome 1.
    Le « Konstantin Tsiolokovsky » est resté mystérieusement bloqué en orbite autour de l’exoplanète sans que quiconque puisse entrer en communication avec lui. S’agit-il de la Mantrisse, mystérieuse entité intellectuelle supérieure à l’homme ?

    Voir ici…

    Du calme, Xavier… Je surchauffe !

  3. Bon ben il va falloir que je le relise… excellente série par un auteur passionné de biologie.

    Sinon, pour revenir a Tryphon, il a quand même un sérieux air de famille avec la photo de Konstantin :
    http://brahmand.com/news/Konstantin-Tsiolkovsky-and-his-vision/3808/1/15.html

    même si l’on peut lire que c’est Auguste Piccard qui a inspiré Hergé :
    http://chantouvivelavie.centerblog.net/4739-vrai-ou-faux-professeur-tournesol?ii=1
    j’en doute.
    http://www.centennialofflight.gov/essay/Dictionary/Piccard/DI38.htm
    Contrairement à Tsiolkovski, Piccard n’a ni barbichette ni surdité…

    Vive l’audioprothèse ! Vive la bande-dessinée !! et vive Xavier !!!

  4. Ah oui: Auguste Piccard, pas mal, la ressemblance…

    Après, le look « 19ème siècle », avec grosse barbe à la Tolstoï, ou barbiche pointue à la Tryphon, les gars se ressemblaient tous un peu…

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