Chouette, un mot nouveau !
Comme lors d’un précédent billet sur le bruit sous-marin, je vous fais profiter de mon abonnement à Science et Vie (si j’étais abonné à Voici, imaginez de quoi je vous parlerais…) pour vous parler de synesthésie, terme et notion que je découvre dans le dernier numéro d’octobre.
La synesthésie est l’association cérébrale de deux sens (voire plus). Cette notion remet en cause la stricte séparation cérébrale de nos sens (vision, audition, olfaction, toucher, goût). En effet, les synesthètes (c’est comme cela qu’ils sont nommés), lors d’une stimulation sensorielle, associent fréquemment une autre sensation. Par exemple, dans le cas de la synesthésie « graphème-couleur », la personne concernée ne pourra s’empêcher d’associer le chiffre 2 au jaune, le 4 au rouge, etc…
Dans le cas de l’audition, la synesthésie la plus fréquente est l’association hauteur tonale-forme (petit point aigu et gros rond grave).
Nous avons tous à faire à des synesthètes qui s’ignorent avec nos patients : il est très difficile pour des gens sans formation musicale ou acoustique de « qualifier » leurs sensations sonores lors d’un appareillage auditif. Les termes de « ce son était plus lourd que l’autre qui est tout fin », « la voix est sombre », « c’est sec », etc… révèlent un peu les associations sensorielles possibles. Mais on n’est pas non plus synesthète parce qu’on manque de vocabulaire sensoriel. Cependant la synesthésie est beaucoup plus fréquente qu’on l’imagine dans la population. Souvent, les personnes concernées ne se rendent pas compte qu’elles sont « atteintes » (ou « possèdent ce don », c’est selon). Il est probable que certains de nos patients à qui nous faisons passer des tests auditifs aient des “évocations sensorielles” autres que le stimulus envoyé.
L’article évoque également une chose qui m’a fait « tilt » (ça doit être ma synesthésie graphème-audition !) : une possible « potentialisation » de nos sens par la mise en commun de plusieurs canaux sensoriels. C’est l’exemple de certains synesthètes forme-audition améliorant leur audition dans le bruit par la reconnaissance du visage de la personne qu’elles veulent entendre dans un brouhaha (en dehors de toute lecture labiale). Cela vous est peut-être en effet arrivé de reconnaître la voix d’une personne que vous voyez au milieu d’une foule, alors que « acoustiquement parlant », son émergence était nulle.
J’en reviens toujours à la même réflexion : le petit point d’audiométrie que notons sur nos audiogrammes est vraiment peu de chose. Nous testons par un « oui/non » une chaîne neurosensorielle complète, complexe, et encore largement inconnue.
XD.